Les petits sauts de puces... ...font les grands voyages !

Aller au contenu | Aller au menu | Aller à la recherche

samedi 14 novembre 2015

Sérénité et deuil

Nous y pensons souvent, ces dernières semaines : comme nous nous sentons pleins de reconnaissance de pouvoir vivre nos récents deuils dans la sérénité – je veux dire, avec le baume au coeur que mettent tous les moments de joie qui ont précédé la mort de mon père, la mort de ma belle-mère, tous les souvenirs des témoignages d'affection que nous avons pu leur donner, ceux que nous avons reçus d'eux. Nous sommes tristes, oui, la tristesse est sans doute d'ailleurs ce qui donne du relief à toutes ces émotions. Il y a le vide, l'absence, la séparation… Il y a les moments où l'on sonde à quel point cette tristesse est grande, intense, profonde, immense. Une vague, un ruisseau.

Mais nous avons pensé aussi : ce décès brutal, qui nous a laissé hébétés et fracassés de douleur lorsqu'il nous a surpris, bien sûr nous nous sommes sentis révoltés, révoltés face à, disons, « la fatalité », « le destin », ou comme chacun peut appeler l'enchaînement des choses. « L'ordre des choses ». Ou leur air de désordre. Nous avons pensé à la mort que provoque un chauffard, à celle qu'occasionne un professionnel peu scrupuleux, à toute violence déchaînée par quelqu'un. Comme un deuil assorti de colère et de haine doit être difficile, douloureux, laborieux à vivre…

Tout cela, nous en avions parlé ces jours-ci, à la maison. Avec notre deuil où il y a tant de joie et de bonheur, où les « heureusement que... » sont tellement plus nombreux que les « ah, si seulement... » Avec nos proches morts qui ont leur place dans nos conversations sans faux-semblants, sans précautions de langage, et s'il faut sortir un mouchoir, il y en a toujours à portée de main : c'est la vie, et nos morts en font partie.

Il doit falloir beaucoup d'amour et de soutien pour renoncer à la colère et à la haine, beaucoup d'amour et de soutien pour laisser la vie et le temps faire le chemin du deuil, qui de la douleur indescriptible évolue vers plus de joie, plus de confiance, plus d'amour que jamais.

Tant d'hommes, de femmes, d'enfants, tant de familles à aimer et à soutenir aujourd'hui...

samedi 7 novembre 2015

Rendez-vous

De Belfort à Liebvillers, il y a toujours 54 km à vélo, ça n'a pas changé depuis fin juillet. Et il y a toujours Pascale et Gino dans nos pensées à l'idée de venir dans ce coin : nous allons passer quelques jours chez Manon.

Et Pascale et Gino, quand nous pensons très très fort à eux, ils l'entendent certainement, et les voilà. Ainsi fin juillet à notre départ de chez Manon. Mais aussi fin octobre, présents à nos côtés ce lundi-là. Et tout à l'heure, à midi sur la Coulée Verte, quelques minutes après que nous avions soulevé encore une fois la question de passer les voir pendant que nous serions dans le secteur, mais le temps compté ne le permettrait peut-être pas, eh bien les voilà.

Ainsi jusqu'à présent nous n'avons prévu ensemble aucune de nos rencontres. La première, c'était en mai 2012, avec notre malle étincelante et les nouveaux coupe-vents des enfants, nous allions au Malsaucy "tester notre matériel", notamment l'équipement de pluie. À ce couple de cyclistes arrêtés au bord de la piste au chevet d'un vélo roues en l'air, nous avions demandé s'ils n'avaient besoin de rien, et ce fut peut-être bien la première de ces conversations qui semblent - aux enfants notamment - ne jamais pouvoir s'arrêter...

Notre deuxième rencontre, c'était en avril 2014, nous allions au Malsaucy encore, avec les Kanaky's (d'autres voyageurs à vélo - à l'époque), Pascale avait reconnu ces voyageurs qu'elle suivait sur leur blog, et nous, qu'elle suivait aussi, c'était drôle, inattendu, surprenant, joyeux, et fort !

La troisième ? A notre départ de Liebvillers, en juillet, je crois bien. Où l'on découvrait avec émerveillement et humilité, que Pascale et Gino avaient pris à cause de nous le goût de voyager à vélo, eux qui étaient auparavant cyclistes "à la journée". Quel déjeuner fantastique, quelle étape extraordinaire ensuite, ensemble, par monts et par vaux !

La quatrième, c'était il y a à peine deux semaines, je me retourne, ils étaient là ! Tellement incroyable, et tellement de tout coeur, je crois que j'ai crié de reconnaissance en les serrant tous les deux dans mes bras. Notre voyage, et le partage de notre voyage à travers ce blog, c'était l'interface par laquelle nous étions en contact : et donc avec Pascale et Gino, qui laissaient de temps en temps en un petit message, nous faisant ainsi savoir qu'ils étaient par là. Avec aussi Mamicatrine, qui suivait attentivement notre progression et les aventures et rencontres qui l'émaillaient, comme en témoignaient les commentaires joyeux qu'elle écrivait régulièrement. J'ai eu si fort le sentiment qu'ils "faisaient le lien"...

Et puis ce samedi, nous étions tous ponctuels à ce rendez-vous que personne n'avait fixé, il était midi au bord de la Coulée Verte lorsque nous nous sommes croisés.

Oh, j'en veux encore des rendez-vous comme ceux là !

jeudi 29 octobre 2015

Les ruisseaux

Ils me rappellent ces lits de pierres et de cailloux que la route franchissait par endroits, dans la vallée de la Durance, il y a un mois. J'imaginais, en les voyant, les flots furieux qui sans doute dévalaient ce lit rocailleux par temps de pluie ou de fonte des neiges, et les assauts des cailloux emportés, brinquebalés, projetés hors du lit.

Ils me rappellent ces lits de pierres que nous avons vus secs, qui peut me dire la météo qu'il fera sur nos ruisseaux dans les jours à venir ? Qui peut prédire ces vagues qui submergent, ces flots qui dégringolent, ces inondations souvent brutales ?

Le fil des jours me surprend, où se sont invités pêle-mêle douleur et incompréhension, apaisement, déni, sérénité, tristesse, apaisement, abattement, confiance… Et les ruisseaux qui font ou défont leur chemin dans ces reliefs imprévisibles, un jour sec et l'autre à sans cesse jaillir, mon pire ennemi est ma poche quand elle est vide, dans ma maison où je reprends mes repères, pour toutes digues j'ai semé des mouchoirs. Autour de ma maison où je retrouve ma ville, les amis sont présents, et c'est vrai, ouf, l'amitié ça tient chaud…

La Providence aujourd'hui, c'est sans doute d'avoir toujours des bras accueillants, une oreille attentive, une épaule réconfortante à portée de ruisseaux les jours où ils dévalent… C'est sans doute ce sentiment d'être entourés, cette bienveillance rencontrée toujours. C'est sans doute la joie présente dans chaque journée, comme les enfants sont maîtres dans l'art de l'instiller !

A la source ce soir, ces mots que je relisais dans un mail, écrits par ma sœur il y a deux mois: « le moment fort de la journée était le rendez-vous prévu pour 17h cet après-midi par nos voisins. Ensemble ils s'étaient concertés pour nous apporter un repas : une manière de venir nous entourer après avoir appris que j'avais perdu mon Papa... Visite discrète et charmante, les plats apportés étaient tout prêts à être réfrigérés ou réchauffés selon que l'on allait dîner à l'horaire français ou américain. Kim a évoqué la tradition américaine des pionniers : "circle the wagons", c'est-à-dire faire cercle avec les chariots pour protéger. » On n'est pas encore prêts à sortir du cercle...

dimanche 25 octobre 2015

Musique

1. Là-bas, sur la Piazza dei Caballe, quand Sébastien s'est déchiré dans un cri, sous le ciel tellement bleu et pur, c'est cet air qui s'est installé en moi. Enfin pas tout de suite : au début je n'ai pas compris ce qu'il disait, là, en face de moi, de quoi il parlait, parce que ce n'était pas possible, ... Turandot - Liu, bonta

(Cette version n'est pas très belle, mais c'est exactement le passage que j'avais en tête)

En arrivant à la maison, je suis allée chercher sur le CD et le livret, cet air venu m'accompagner.

Liù... bontà !
Liù... dolcezza !
Ah ! camminiamo insieme un'altra volta,
cosi, con la tua man nelle mia mano!
Dove vai ben so,
ed io ti seguiro
per posare a te vicino
nelle notte che non ha mattino!


Liù... bonté !
Liù... douceur !
Ah ! marchons ensemble encore une fois,
Ainsi, ta main dans ma main !
Je sais bien où tu vas,
Et je te suivrai
Pour me reposer près de toi
Dans la nuit qui n'a pas de matin !

2. Ce printemps, cet été, j'ai beaucoup eu en tête, et un petit peu écouté, cette chanson de David Hallyday que j'entendais dans le métro au temps de mes études : Tu ne m'as pas laissé le temps Comme je me sentais pleine de gratitude et de reconnaissance d'avoir eu au moins un petit peu le temps de dire à mon papa que je l'aimais, d'être près de lui, de l'entourer...
Je la réécoute, mince pourquoi est-ce tellement plus difficile de dire "je t'aime, je t'aime fort" que "merci, merci beaucoup" ? Si on pouvait le dire à chaque fois qu'on le ressent, à chaque fois qu'on est près d'une personne qu'on aime... On l'a dit un peu, nos enfants l'ont dit beaucoup, beaucoup, à leur façon, cela nous réconforte un tout petit peu...

3. Le chant choral pour la cérémonie ? Je n'ai rien dit, moi. Sébastien non plus. Catherine n'était plus là pour le demander. Il avait décidé qu'il serait là, ce chant. Je laisse mes frère, soeurs ou maman le nommer, je suppose que de lire ces mots ils ont compris duquel il s'agit... la Providence nous rappelle sa présence, même dans ce fracas de vide et de douleur.



MERCI, merci à vous tous derrière votre écran, qui avez porté notre petite famille sur ces routes de France et d'Italie, peut-être est-ce difficile à croire pour ceux qui ne nous écrivaient pas, et peut-être aussi pour les autres, mais : vous étiez vraiment avec nous, nous nous sentions vraiment portés, accompagnés, veillés... Jamais abandonnés.

Je vous invite à être très, très fort en pensée, en prière, en intention, en amour avec nous lundi après-midi, nous comptons sur vous...

vendredi 23 octobre 2015

Belfort

Voilà, nous sommes là... Oh, comme c'est bien rangé, c'est vrai que nous étions partis pour longtemps...

Les enfants s'endorment dans la chambre, ils étaient heureux de retrouver la maison, Clémence a sorti plein de choses qu'elle a reçues de sa mamie, porte-monnaie, cartes postales, gilet tricoté... Et elle s'endort dans son lit habillé de la parure qu'elle lui avait offerte il y a quelques mois, lorsqu'elle avait eu son matelas et sa couette à elle. Heureuse et triste...

Giovanni est arrivé ponctuel ce matin, il a sonné à 7h25 à la porte de l'auberge de jeunesse de Piacenza où Serafin, de la paroisse de la cathédrale de Piacenza où nous nous étions adressés, nous avait réservé une chambre. Ne pas chercher, ne pas se décarcasser, quel soulagement...

Ainsi pour notre retour, nous avons contacté notre assurance, et sommes pleins de reconnaissance pour le, confort n'est peut-être pas le mot juste, mais, que quelqu'un s'occupe de tout, contacter les bonnes personnes, cerner le service nécessaire, le réserver,, ne pas devoir se préoccuper de tout ça, nous qui étions en voyage en autonomie complète, c'est un peu paradoxal peut-être, mais tellement nécessaire !

Ce matin, il a fallu du temps pour trouver comment installer le tandem sur la remoque, pas du tout adaptée (il a dû y avoir du téléphone arabe dans l'histoire, le "un vélo normal, un tandem de 2,20m de long et une caisse de type cantine militaire" avait apparemment été transformé en "5 vélos"). Et si le mien a été installé en quelques secondes, on a tâtonné un moment avant de trouver une installation satisfaisante pour le tandem, sans appui sur des parties fragiles ou pas suffisamment robustes.

Nous sommes partis à 8h30, et magie des autoroutes, ces grands rubans d'où on aperçoit quelques sommets au passage entre deux murs anti-bruits, vers 15h nous étions devant la maison.

Abasourdis, encore, ou toujours, ou à nouveau, je ne sais plus trop.

Bien sûr pour nous la vie continue. Nous repartirons, nous ne savons ni quand, ni où, ni comment, nous qui avions quitté Belfort voilà 3 mois avec l'idée d'aller peut-être vers l'Espagne et le Portugal, et qui traversions l'Italie..

MERCI, très grand merci, à tous pour vos marques de sympathie, d'amitié, de soutien, de chaleur, que je reçois avec une grande reconnaissance, et que je tâche de transmettre à Sébastien.

Nous serons réunis lundi après-midi, à Sainte-Thérèse.