42 km, Clémence 3km

Nous sommes installés quelques kilomètres après Vukovar, au fond du parking d'un mémorial et cimetière... Mais, bon, même si on a connu plus bucolique, le lieu n'est pas glauque pour autant. C'est que devant ce mémorial j'ai constaté que la roue de la remorque était à plat ; j'avais repéré il y a deux jours un trou dans le pneu, et nous sommes bien contents d'avoir trouvé un pneu de rechange hier à Osijek. Mais à 19h30 on ne se lance pas dans une réparation sans avoir d'abord installé le bivouac, alors quelques coups de pompe, quelques centaines de mètres, et la bande ombragée de deux mètres de large entre deux zones de parking offre juste, mais alors tout juste la largeur nécessaire pour la tente, et c'est bien plat.

J'ai installé tente et dortoir pendant que Sébastien réparait la roue de remorque, puis il s'est attelé au changement de pneu de sa roue avant - profitant du pneu neuf qui était monté sur la roue apporté par les journalistes. Grâce à quoi Clémence et Baptiste ont eu beaucoup de plaisir à jouer sur le grand parking goudronné avec chacun un pneu !!!

Il pleuvait ce matin, nous avons pris le petit-déjeuner dans la tente avant de partir, de quitter ce bivouac boueux pas terrible entre Nemetin et Sarvas... Nous étions fatigués hier soir, le bivouac était assez minable, la boue collait... Bref, on était plutôt de mauvais poil, personne n'a eu le courage ni l'envie de s'atteler au blog...

Donc, ce matin, nous avons quitté ce bivouac boueux, emportant en souvenir une certaine quantité de boue. Qu'on est allée nettoyer au robinet du cimetière d'un prochain village, décidément nous n'avons jamais autant fréquenté les cimetières.

Hier nous avons franchi la barre des 7000 kilometres parcourus sur les routes de France et d'Europe depuis notre départ de Belfort le 26 mai 2012. Et dans l'air, les tilleuls ont pris le relais pour embaumer, ça sent bon !

À Vukovar nous sommes entrés par la rue principale, entre deux maisons ordinaires on voyait ça et là des façades criblées de balles ou autres impacts de ce genre... C'est que la ville a payé un lourd tribut à la guerre. Nous le savions un peu par notre guide, un peu par les FloChloandcoavelo qui l'ont évoqué lorsqu'ils sont passés ici.

En nous approchant du Danube nous nous sommes arrêtés un instant pour le contempler, avec son petit port de plaisance. C'est là qu'on a vu passer deux cyclistes chargés, et Sébastien voyant "Paris - Pékin à vélo" a repéré qu'ils étaient français ! Nous avons ainsi fait la connaissance de Dominique et Michel (voilà des prénoms qu'on oubliera pas :) ), originaires de la région de Caen, partis de Nantes le 12 avril et en route, comme nous, pour la Mer Noire. Il y en a, des français, sur cette veloroute ! D'ailleurs ils suivent le blog des FloChloandCo, et espèrent les rencontrer peut-être, ils prévoient d'atteindre la Mer Noire à peu près en même temps...

Nous avons pris congé, et tandis que les enfants avisaient l'aire de jeux toute proche, nous avons pris place à la terrasse du café juste là, allez, pourquoi pas ! Ça permet de brancher le téléphone un moment, en plus.

Une jeune femme attablée tout près nous interpelle :"Étiez-vous à Osijek hier ?" Elle a expliqué - en anglais, alors Sébastien m'a en partie traduit ;) - qu'elle avait eu au téléphone celui qui nous avait servi hier, et qu'il nous passait le bonjour !

Hier en arrivant à Osijek, nous n'étions pas seuls : il y avait aussi un orage... Il était là, tapi derrière son nuage noir, à nous guetter... Devant nous, un pont pour atteindre la ville. Sur notre gauche, juste là, un café. On y va ? Au café le temps que ça passe ? Le gros coup de vent qui précède souvent immédiatement les trombes d'eau, s'était levé... Sébastien préférait s'arrêter en ville - après le pont !

On a tergiversé un peu, puis - allez, on y va, on s'est élancés face au vent sur la piste cyclable qui partait à gauche du pont. Mauvaise pioche, elle prenait fin au pied de deux étages d'escaliers, un plan incliné au bord des marches ne nous laissait pas trop d'espoir de monter à velos chargés. Demi-tour, nous voilà de nouveau à l'entrée du pont, le vent souffre autant qu'il peut... On y va ? On attend ?...

On y est allés ! Et il a attendu une petite centaine de mètres, l'orage, pour nous fouetter avec ses diagonales grises, une fois qu'on était bien engagés, qu'on ne pouvait plus faire demi-tour... Sébastien filait devant, il m'a avoué avoir été étonné que j'arrive à le suivre, j'étais très motivée pour me mettre vite à l'abri !

A droite, une grande place, une rue pavée, plusieurs bars... Une pizzeria avec sa carte affichée en grand en croate et anglais, proposant pizzas, pâtes, salades, risottos... nous a paru agréable, nous avons garé les vélos devant, rentré les paniers et pris place - au chaud ! Le refroidissement qui accompagne chaque averse orageuse est assez spectaculaire, et les enfants grelottaient.

Nous avons pris une pizza, un plat bosniaque appelé Cepavi servi avec des frites, une salade et il a proposé pour les enfants de petites pizzas. Qui en définitive n'étaient pas si petites que ça :D Celui qui servait était aux petits soins, il est allé chauffer un peu les jus d'orange des enfants avant qu'ils n'aient eu le temps de me dire "c'est trop froid !" comme cela arrive souvent, a donc négocié pour nous ces minipizzas pas si minis que ça, et à la fin, a apporté une gaufrette au chocolat à chaque enfant ravi !

Et c'est lui qu'Ella, assise à la table à côté sur cette terrasse de Vukovar, avait au téléphone quelques instants avant que nous ne prenions place !

Ella et son mari, qui étaient attablés avec leur petit garçon Noël (oui, le prénom français !) sont de Zagreb, de passage ici. Ils nous ont parlé de la guerre ici... La ville a été assiégée par les Serbes, et pour ainsi dire rasée. Ils nous ont montré sur la carte un petit village tout proche, Ovcara (Prononcer Ovtchara, il y a un signe sur le c). Un mémorial s'y trouve... les Serbes y ont amené hommes, femmes, enfants... Pas de quartiers... Nous pensions à Oradour sur Glane...

La guerre est récente, 1991-95, et ici on la voit encore bien, il y a le château d'eau devenu mémorial emblématique, et ces façades criblées d'impact, ces bâtiments à moitié détruits...