20km

Grande nouveauté ce soir pour moi : je suis dans la tente, et je dactylographie !!!!!!! (Dans le noir) Ca ne vous dit peut-être pas grand-chose, mais pour moi, cela signifie taper à la vitesse à laquelle je parle, ou presque... au lieu d'anonner laborieusement mot après mot, du bout d'un seul doigt, sur le clavier tactile qui s'affiche en bas de l'écran de mon smartphone. C'est un achat de dernière minute fait à Briançon le jour de notre départ - la veille, nos horaires de sortie avaient coïncidé avec ceux de la fermeture des magasins, et à la réouverture, il pleuvait très fort... Achat important avant la frontière : c'est un clavier français qu'il me fallait ! Mais nous n'avions donc pas pu en charger la batterie, nous l'avons fait hier soir à l'ancien monastère San Francesco de Susa. Et ce soir, j'inaugure. Voilà, si l'article est plus long, vous saurez pourquoi ;^)

Ce matin nous avons quitté pas très vite le lieu où nous avions passé la nuit, la chambre était rendue à l'heure - 10h - mais ranger dans les différentes sacoches et dans la malle les affaires sorties, c'était presque plus long que de ranger tout un bivouac ! Nous avons vu qu'un amphithéâtre romain était fléché tout proche, et avons décidé d'aller voir. On ne sait pas trop comment on s'y est pris, mais on l'a raté, on a vu un panneau qui l'indiquait dans la direction d'où on venait, mais bon, on arrivait à un aqueduc romain du 4è siècle - comme le Pont du Gard il me semble. Sous lequel se trouvait un "Pozzo druidico", puits druidique, d'avant l'installation des romains dans la région, quelques siècles avant JC. Quelques mètres plus loin, un arc de triomphe romain. Accessoirement, quelques noix sous un noyer, et les enfants jouaient joyeusement tous les trois, ils avaient trouvé un gisement de billes colorées (genre pistolet à billes) qui les occupait beaucoup. Mais bon, on n'avait toujours pas la moindre idée d'où était cet amphitheatre.

C'est là qu'est apparu Alberto. Qui parlait français. Qui nous a montré les coupelles creusées dans cette roche où jouaient les enfants, par les druides. Il ne nous était pas venu à l'esprit que si on faisait abstraction des bâtiments autour de nous, maison, château de Savoie, arc de triomphe, aqueduc, ces roches étaient - avaient été, donc - le point culminant du secteur.

Et puis, et puis, nous avons parlé de beaucoup de choses, Alberto nous a parlé des Celtes comme jamais personne ne m'en avait parlé - où peut-être comme jamais je n'avais su l'entendre, comme un rai de soleil qui met en lumière des choses qu'on avait jamais vues sous cet angle, un peu. Nous a expliqué le compromis entre les Romains et la population celte de ces lieux, objet de l'arc de triomphe sur lequel nous pouvions voir représentées la délégation celte, la délégation romaine, les animaux sacrifiés, le tout sculpté "comme une photo", tiens c'est vrai... Il nous a aussi conduit à l'anfiteatro romana, nous étions vraiment passés juste à côté. Et tandis que nous étions dans les gradins, il est descendu, et du milieu nous a fait découvrir l'acoustique fantastique du lieu : il parlait à voix normale, et nous l'entendions parfaitement ! Nous sommes allés ensuite à notre tour faire l'expérience de cette acoustique extraordinaire. A découvrir absolument si vous en avez l'occasion ! Quand on est entre centre et périphérie, il y a beaucoup d'écho ; du centre, aucun écho, mais une rondeur du son, une, je ne sais pas, amplification ? Incroyable ! Jamais testé une sono aussi parfaitement réglée ;)

Alberto souhaitait nous offrir une spécialité pâtissière locale, il nous a composé dans une pâtisserie un assortiment de biscuits énorme et molto delicioso !!!! Nous en avons dégusté une partie au bord de la rivière, la Dora (même racine que Durance), avant de faire un tour du côté de la monumentale Porte de Savoie, et la cathédrale San Giusto, mille ans... Il a offert un cappucino à Sébastien pendant que je passais un moment au parc avec les enfants, puis nous nous sommes doucement acheminés vers le départ de Susa. Avant cela, on a encore discuté un moment avec Danino, puis avec Philippe, et tous ceux dont nous n'avons pas les prénoms !

Apres une vingtaine de kilomètres, en pente douce et faible vent de face aujourd'hui, pour aller chercher un bivouac, après avoir fait le plein d'eau nous nous sommes éloignés de la route. Pfou, ça montait... pas comme un col, mais quand même ! Au stop je me suis arrêtée pour souffler, il y avait du monde là qui s'est mis à applaudir à notre vue, une dame s'est approchée et nous a adressé la parole en français - ayant vu le drapeau - qu'elle parlait à la perfection. Marie-Louise (Mariluise ? Maria-Luisa ?) était très enthousiasmée par notre voyage, intéressée par la liberté française d'instruction, et nous a conduit à un endroit pour planter la tente : ici aura lieu le week-end prochain une grande fête de la châtaigne. C'est justement ce qu'on avait prévu de manger ce soir, bouillies en pensant à Tximista et Lenaia de Q Lacanau, dont le papa nous avait indiqué ce mode de cuisson, et à Fabien du Graoux, rencontré le soir où nous avions testé cette cuisson. On s'est régalés !

Depuis un moment nous voyions dans le lointain une construction au bout d'un promontoire rocheux, dominant la vallée. Il s'agit de Sacra San Michele qui se trouve sur la ligne virtuelle reliant le Mont Saint-Michel français, et un autre Saint-Michel dans le sud de l'Italie - je n'ai pas encore repéré où. Ligne imaginaire sur la carte, voie d'énergie particulière apparemment. Que briserait la ligne de train à grande vitesse en projet dans la région, qui rencontre ici une très vive opposition semble-t-il. En roulant sous l'autoroute hier on pensait au budget certainement faramineux de ce chantier titanesque, viaducs haut perchés entre deux tunnels... Pour aller toujours plus vite...