42km à vélo 164km en train

De Briançon à Embrun, on descend la vallée de la Durance. Enfin "descend"... Façon de parler ! Des côtes à 2 à 4%, pour une altitude de quelques mètres plus naute à l'arrivée qu'au départ : autant vous dire que sous le soleil de plomb, avec le fort vent du sud - donc en pleine face - qui nous séchait littéralement sur pied / sur roue, les montées paraissaient interminables et terriblement dures. Dans les descentes à moins de 2,5%, il fallait pédaler, fort, heureusement qu'il y avait un panneau pour nous signaler qu'on était en descente, on ne s'en serait pas rendu compte...

On a regardé la météo, et vu qu'ici comme à Vaugris, le vent du sud apportait la pluie, et ne se calmerait qu'au moment de lui laisser la place : forts risques d'orage pour une bonne partie des deux jours suivants. Et si on s'échappait ?

A Embrun notre route passait près de la gare ; configuration idéale avec un accès de plain-pied, un train pour Marseille dans 40 minutes, un autre demain matin : le guichetier très aimable nous a renseignés efficacement, et proposé son aide au besoin pour l'embarquement.

Une demi-heure de réflexion, assortie d'un coup de fil à Jérémie : nous débarquerions demain à La Tour d'Aigues. Le temps d'aller chercher deux baguettes, et le train arrivait : postés en bout de quai après avoir fait demi-tour, nous étions à l'affût du logo "vélo" qui nous indiquerait où prendre place dans le train, sachant que c'était à une extrémité, mais laquelle, on le saurait à l'arrivée de la rame. Nous sommes montés, d'abord mon vélo dans l'espace à strapontins, où se trouvait déjà un vélo électrique. Un peu rude d'y faire entrer le Pino qui tournait tout juste entre la porte et l'arrondi des toilettes, il y a eu plein de bras pour aider ; on l'a posté dans le couloir, retirant deux sacoches pour libérer de l'espace. Les enfants tout heureux nous avaient réservés un carré, après avoir commencé à converser avec Bernard, le propriétaire du vélo électrique, nous sommes allés les y rejoindre. Bernard est malvoyant ; il ne peut conduire de voiture, mais se déplace à vélo ; électrique, pour pouvoir concenttrer ses efforts sur son positionnement spatial et son attention à ce qui l'entoure. Chapeau... Il paraît que quand, enfant, on lui a diagnostiqué cette malvoyance, on a dit à ces parents que "cet enfant, vous n'en ferez jamais un bachelier". Il n'est effectivement devenu "que" chercheur au CNRS :D

Après le bon casse-croûte, les enfants sont allés jouer avec la petite Lola qui voyageait avec son papa ; 18 mois, un sourire enjôleur, et en plus ils descendaient aussi à Manosque. Car oui, c'est à Manosque que nous avons prévu de descendre : il nous resterait une quarantaine de kilomètres pour La Tour d'Aigues, et la météo y était plus clémente, annonçant des pluies moins fortes, moins durables, moins orageuses. Pour descendre du train il y a eu là encore tout plein de bras, et tout fut sur le quai en un temps record ! Le contrôleur, qui avait été assez irrité par le Pino qui à un moment bloquait la porte du train - énormément de secousses, entre Embrun et Gap, l'avaient notoirement déplacé - avait bien détendu l'atmosphère au moment du contrôle des billets, et a fait partie des mains fortes prêtées pour la descente. On a remercié à la ronde, le train est reparti, et le chef de gare nous a indiqué que nous pourrions emprunter, seuls, le passage à niveau à l'extrémité du quai, plus aucun train ne passant ici ce soir.

Sortant du parking, nous avons demandé à un automobiliste la direction de Vinon-sur-Verdon : à 14km de là nous savions où y bivouaquer, nous y étant arrêtés l'an dernier à la descente des gorges du Verdon. Un site que nous avaient indiqué Julie et Jérémie, d'ailleurs. "Mais, vous n'allez pas prendre la route à cette heure-ci ! (20h40) Enfin, c'est comme vous voulez, mais au lieu de prendre le pont sur la Durance, si vous tournez à droite juste après le canal EDF, j'ai du terrain, vous pourrez y mettre la tente. Y a une piscine aussi". Argument fatal ? En tout cas Alain nous a convaincus, et nous n'avons pas seulement été invités à planter la tente sur la pelouse, mais aussi chaleureusement conviés à l'apéritif et au dîner sur la terrasse. La France aussi prend soin de nous ! Et comme Ilda est assistante maternelle, les enfants ont trouvé un paradis de jouets :)